Un orage immobile_F. Sagan

Publié le par Ilse

Orage

Nicolas Lomont fut notaire à Angoulême dans les années 1830. Resté célibataire toute sa vie il n’en a pas moins aimé, adoré, la jolie Flora de Margelasse issue de la bourgeoisie locale, fraîchement débarquée de Londres cet été 1832. Leur idylle ne prend pas malgré leur excellente entente et s’achève définitivement avec l’arrivée de Gildas Caussinade, métayer de la région au charme ravageur.

Le narrateur se perd alors dans les sarcasmes d’une vie de célibat à la fois inintéressante et répétitive.

Il décrit sa profonde solitude et sa souffrance suite au départ du couple vers la capitale. Néanmoins, tout son ressenti, ses interrogations, son désespoir font que les journées ne sont pas si semblables que cela. Il se découvre.

A son grand étonnement, après deux ans d’absence, le couple revient dans leur propriété. Les bals, animant les soirées de Jarnac, reprennent. Ils sont accompagnés d’une étrange gouvernante, Marthe, qui s’avère être une très belle femme…

 

 

Mon avis :

 

C’est l’histoire d’un homme qui est en proie à ses doutes : il est confronté à une situation qui le dépasse, malgré son statut social, son physique, il tombe amoureux d’une femme qui n’est pas attirée par lui, mais l’aime comme un ami ou un grand frère. Et il la voit s’éloigner encore davantage avec l’arrivée d’un homme plus jeune, plus beau, qui n’est que métayer mais semble particulièrement doué pour l’écriture. C’est une double humiliation.

L’auteure met en avant les différences de classes sociales de l’époque, le côté emprisonnant de la bourgeoisie : « J’ai été, je suis et je mourrai bâillonné, esclave des lois, des préjugés, d’us et d’habitudes, de maniaqueries et de confort, d’interdits et de chaînes dont je n’aurai jamais connu la raison, l’origine ni l’utilité. »

L’arrivée du personnage de Marthe met un peut de piment dans ce récit et ramène tous les personnages à ce qu’ils sont réellement. Toujours avec la légèreté qui la caractérise, l’auteure s’amuse presque cruellement de cette société dorée, édulcorée où l’on croit qu’il ne se passe jamais rien…

Ce qui est à chaque fois saisissant, pour moi, quand je lis Sagan, c’est mon attachement à ses personnages qu’ils soient bons ou mauvais. Un livre lu, dévoré, très vite.

 

 

Extraits :

 

& On pourrait trouver singulier que je parle si durement d’une femme qu’après tout j’ai aimée dix-huit mois, mais c’est qu’elle le mérite. Il faut vraiment être jeune pour être dégrisé d’une femme par le fait d’autres hommes. Il faut être vraiment fort lucide pour qu’une femme puisse perpétrer seule dans votre cœur, et sans nulle aide extérieure, sa propre destruction.

 

& C’est grâce à moi que, ce jour-là en tout cas, Flora et Gildas purent finir sans trop de mal leur duo passionné. Et le fait de m’en apercevoir me communiquait un rire nerveux et sarcastique que je ne me connaissais pas, un rire qui me soulageait et m’enferrait en même temps. C’est ainsi que je commençai la découverte de moi-même.

 

& Comment supporter de la voir jeter vers cette erreur de la nature, vers ce cœur versatile et faux, vers Gildas, les regards qu’elle lui adressait et dont le moindre eût comblé tous mes désirs ? D’ailleurs quel désir ? Je ne m’en sentais plus le moindre, je ne me sentais que du chagrin à imaginer celui de Flora, chagrin, qui, semblait-il, arriverait très vite.

 

 

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Publié dans Vie à Lire Sagan

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